VIVIAN MAIER, du 1 janvier 2025 au 16 mars 2025, Musée de la photographie de Nice

Vivian Maier est une photographe qui n’a jamais été reconnue de son vivant.Française par sa mère, elle a vécu essentiellement à New York et Chicago.Femme discrète voire énigmatique, elle s’est passionnée pour la photographie dans les années 1950 et saisit sur le vif très souvent des gens, sans exclure toutefois des lieux, notamment New York et Chicago où elle a vécu.
Elle peut tout à la fois faire preuve d’ironie en prenant en gros plans des bourgeoises avec leurs visons que rendre compte avec humanité de la misère des plus humbles.

Sans artifices, coiffée d’un petit chapeau et arborant un long manteau elle aime les histoires et les faits divers au point d’entasser des piles de journaux dans les chambres qu’on lui alloue. En effet après avoir travaillé dans une usine de poupées, Vivian Maier a consacré sa vie aux enfants en devenant nounou.Elle reste 11 ans au service de la famille Gensburg puis servira d’autres familles.Si les Gensburg l’adoraient d’autres la voyaient comme une sorcière. Secrète, elle n’hésitait pas à user d’un verrou pour préserver une vie privée vraisemblablement marquée dans sa jeunesse par des violences, ce que peut laisser supposer sa méfiance et son hostilité à l’égard des hommes.

Obsédée par la photographie, elle profite des promenades avec les enfants ou de son temps de liberté pour porter un regard rempli d’humanité sur ce qui l’entoure.

Ses photographies témoignent d’un sens de la composition exacerbé. En effet le quadrillage du sol de cette école fait écho aux grilles qui ceignent la cour. Dans un jeu subtil, le banc sur lequel sont assis les écoliers épouse les obliques du mur et du sol. Grâce à son sens de la composition et à la plongée, Vivian Maier parvient à saisir ainsi toute la rectitude et le conformisme de l’école.

La posture des corps participe également à ce sens de la composition.En témoigne la verticalité des bourgeois interpellés par l’arrestation d’un vagabond au dos voûté.Les béquilles s’opposent au collier de perles et l’anonymat significatif de ce pauvre hère au visage d’une femme dont les gants et le sac nous rappellent qu’elle un a un rôle à tenir dans la société.

De façon ironique encore la tristesse des visages de jeunes immigrés dément l’aspect festif que peuvent suggérer les ballons.Le « Exit » exhibé au dessus de leurs têtes semble signifier que le rêve américain ne fonctionne pas pour tout le monde.

Cette capacité à saisir les blessures de tout un chacun trouve un écho dans la propre vie de Vivian Maier qui a fini sa vie en puisant dans les poubelles, se nourrissant de corned beef à même la boîte, ne devant son hospitalisation qu’à la gentillesse des Gensburg. Morte en 2009, à l’âge de 83 ans, cette date coïncide au moment où John Maloof, devenu acquéreur des photos de Vivian,commence à s’intéresser à son travail et où l’on commence également à reconnaître son génie artistique. En 2011 est organisée une exposition au centre culturel de Chicago.

Présente dans toute une série d’autoportraits, elle aime à rappeler sa présence soit par la mise en abîme, soit par un jeu d’ombre.Dans ce cliché où elle photographie une mère et sa fille, son ombre semble nous questionner sur la place qu’elle a elle-même occupé au sein d’une famille, française par sa mère, américaine par son père et dont les parents se séparent alors qu’elle est âgée de 3 ans. En multipliant parfois son reflet grâce à des miroirs, elle nous invite à traquer l’être sous l’artiste et la femme ordinaire et à nous dire avec elle :  » qui suis-je ? « 

Comme jadis les impressionnistes du XIX siècle les 120000 photos de Vivian Maier constituent l’oeuvre majeure d’une femme qui a vécu dans l’anonymat et morte dans la misère.

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